Qu’est-ce qu’une Association?
Article Association LoiLorsqu’un groupe de personnes désire se rassembler pour poursuivre un but commun autre que pour faire des profits, il est parfois souhaitable d’exploiter cette organisation à titre d’association. On peut penser, par exemple, à une association sportive, un club, un parti politique, une association de salariés ou de professionnels, etc.
Il s’agit d’un type d’organisation souvent mal compris, dont les règles et balises semblent moins claires et précises que celles régissant les entreprises incorporées. En ce sens, essayons d’y voir un peu plus clair et de démystifier ce type de regroupement.
I. STRUCTURE JURIDIQUE D’UNE ASSOCIATION
En vertu des dispositions du Code civil du Québec, un statut légal est accordé aux associations non constituées en corporation. Ces dispositions définissent l’association contractuelle comme suit :
« Le contrat d’association est celui par lequel les parties conviennent de poursuivre un but commun autre que la réalisation de bénéfices pécuniaires à partager entre les membres de l’association. ».
Le Code ne reconnaît qu’un seul type d’association, celle-ci est formée dès la conclusion du contrat, si aucune autre époque n’y est indiquée. Bien que l’association ne soit soumise à aucune formalité d’immatriculation en vertu de la Loi sur la publicité légale des entreprises, n’y étant pas assujettie au sens de l’article 21 de cette loi., elle peut choisir de s’immatriculer volontairement.
1. Le contrat
L’association n’a pas de charte ou de statuts de constitutions comme les sociétés par actions, elle se forme plutôt au moyen d’un contrat, lequel peut être écrit ou verbal. Ce contrat peut même résulter de faits manifestes qui indiquent l’intention de s’associer. Cela dit, généralement, c’est le contrat d’association qui doit régir l’objet, le fonctionnement, la gestion et les autres modalités de l’association. En pratique, le contrat prend la forme de règlements. Le contrat est présumé permettre l’admission de membres autres que les membres fondateurs.
2. La poursuite d’un but commun et l’absence de bénéfices pécuniaires
L’association est présumée poursuivre un but autre que la réalisation de profits. En effet, l’association se veut avant tout un organisme sans but lucratif. Sans but commun, il ne peut y avoir association. Par exemple, les tribunaux ont déjà jugé que des huissiers qui partageaient certaines dépenses communes ne constituaient pas une association puisqu’ils poursuivaient distinctement, et dans leur intérêt personnel seulement, l’accomplissement de leurs fonctions d’huissier. Dans ce cas, le tribunal avait conclu que même si l’on retrouve des intérêts communs, il n’y pas d’entreprise commune ni de but commun.
3. La personnalité juridique de l’association
L’association possède certains attributs de la personnalité juridique mais aucun article du Code ne lui confère une personnalité morale à part entière. Les administrateurs de l’association peuvent ester en justice en demande ou en défense, pour faire valoir ses droits et intérêts dans les cas où l’association possède un intérêt juridique à poursuivre. Sauf pour l’association de salariés, lorsque les administrateurs d’une association ou certains d’entre eux agissent en justice en cette qualité, ils peuvent le faire en leur nom ou sous le nom que l’association s’est donné ou sous lequel elle est connue. Tout comme une société par actions, l’association peut posséder son propre nom et sa propre place d’affaires.
4. Les membres
Le Code est muet quant aux qualités requises du membre d’une association contractuelle. Il faut donc en conclure que toute personne capable de contracter peut devenir membre d’une telle organisation. Dans un contrat d’association, il est permis de prévoir que l’admission d’un nouveau membre doit être autorisée par les administrateurs de l’association. Et, dans un tel cas, les administrateurs ont le droit de refuser un nouveau membre sans qu’il soit nécessaire de motiver leur décision, et ce, même si la personne satisfait aux conditions d’admissibilité prévues aux règlements de l’association. Tout membre a le droit de participer aux décisions collectives. Cette règle est d’ordre public, c’est-à-dire qu’on ne peut y déroger par une clause du contrat ou autrement. Toute décision collective, y compris celle qui a trait à la modification du contrat d’association, est adoptée à la majorité des voix des membres, à moins de stipuler autrement dans le contrat d’association. Tout membre, même exclu de la gestion, a le droit de se renseigner sur l’état des affaires de l’association et de consulter les livres et registres de celle-ci. Encore une fois, il s’agit d’une règle d’ordre public qui s’impose d’elle-même, malgré une clause à l’effet contraire au contrat.
Un membre peut, malgré toute stipulation contraire, se retirer de l’association, même constituée pour une durée déterminée. Toutefois, tout membre qui se retire est tenu au paiement de la contribution promise et des cotisations échues. Tout membre peut être exclu de l’association par une décision des membres de l’association, prise à la majorité des voix des membres ou suivant toute autre proportion prévue par le contrat d’association Même si cela semble aller de soi, mentionnons que le Code civil précise que les membres peuvent décider de mettre fin à leur association.
5. Les administrateurs
En l’absence de règles particulières dans le contrat d’association, les administrateurs de l’association sont choisis parmi ses membres. Ce sont les membres fondateurs de l’association qui deviennent de plein droit les premiers administrateurs de l’association, jusqu’à ce qu’ils soient remplacés. L’administrateur agit à titre de mandataire des membres de l’association. Son rôle consiste à représenter l’ensemble des membres, c’est-à-dire la collectivité et non sa propre personne ou qu’un groupe précis de membres. L’administrateur d’une association n’a que les pouvoirs qui lui sont conférés par le contrat d’association, par la loi ou ceux qui découlent de son mandat. Tel que déjà mentionné ci-dessus, l’administrateur peut ester en justice, tant en demande qu’en défense, pour faire valoir les droits et les intérêts de l’association.
6. La gestion de l’association
En général, les règles de régie interne de l’association sont prévues dans ses règlements généraux. Ils prévoient la manière de tenir et de convoquer les assemblées, l’admission des membres, l’élection des administrateurs, etc. Cependant, il faut retenir que ce cadre d’organisation reste volontaire car il n’est pas imposé par le Code civil. Il est donc souvent suggéré d’adopter de tels règlements, puisque les règles prévues au Code, comme étudiées ci-dessus, ne sont pas très détaillées.
7. La fin de l’association
Le contrat d’association peut prendre fin par l’arrivée du terme ou l’avènement de la condition énoncée au contrat, par l’accomplissement de l’objet du contrat ou par l’impossibilité d’accomplir cet objet. Il peut également prendre fin par l’exercice du droit des membres de décider de mettre fin au contrat d’association, par l’adoption d’une décision prise à la majorité des voix des membres ou selon la proportion des voix prévue au contrat d’association.
Lorsque le contrat d’association prend fin, l’association est liquidée par une personne nommée par les administrateurs ou, à défaut, par le tribunal. Après avoir procédé au paiement des dettes de l’association, les biens qui restent sont partagés entre les membres chacun pour une part égale, à moins que le contrat d’association prévoit un autre mode de partage. Cependant, une règle particulière d’ordre public est prévue en ce qui concerne le partage des biens qui proviennent des contributions de tiers. Dans ce cas, les biens qui proviennent de contributions de tiers doivent être dévolus à une autre association, à une personne morale ou à une fiducie qui partage des objectifs semblables à l’association ou, dans le cas où les biens ne peuvent être ainsi employés, à l’État et administrés par le curateur public comme des biens sans maître. Ce n’est que si ces biens ne peuvent être ainsi employés et qu’ils sont de peu d’importance qu’ils pourront être partagés également entre les membres.
II. LA RESPONSABILITÉ
1. La responsabilité des membres face aux dettes de l’association
Voilà une question qui occupe souvent les personnes qui ont l’intention former une association ou qui sont invitées à joindre une telle organisation. En principe, la responsabilité du membre est limitée à sa mise de fonds, tel un actionnaire de société par actions. En effet, le membre d’une association n’est responsable personnellement des dettes de celle-ci que jusqu’à concurrence de la contribution promise et des cotisations échues. Toutefois, il existe une exception importante à ce principe. Un membre qui administre de fait les affaires de l’association est tenu des dettes de celle-ci au même titre qu’un de ses administrateurs.
2. La responsabilité des administrateurs face aux dettes de l’association
En cas d’insuffisance des biens de l’association, les administrateurs sont solidairement ou conjointement tenus responsables personnellement des obligations de l’association qui résultent des décisions auxquelles ils ont souscrit pendant leur administration, selon que ces obligations ont été, ou non, contractées pour le service ou l’exploitation d’une entreprise de l’association. Toutefois, les créanciers personnels de l’administrateur ont préséance sur les créanciers de l’association quant au produit de la vente de ses biens personnels. En effet, le Code civil prévoit que les biens de chacune de ces personnes ne sont affectés au paiement des créanciers de l’association qu’après paiement de leurs propres créanciers.
Le 3e alinéa de l’article 1525 du Code civil définit ce que constitue l’exploitation d’une entreprise comme suit :
« Constitue l’exploitation d’une entreprise l’exercice, par une ou plusieurs personnes, d’une activité économique organisée, qu’elle soit ou non à caractère commercial, consistant dans la production ou la réalisation de biens, leur administration ou leur aliénation, ou dans la prestation de services. ».
Cependant, cette définition ne dissipe pas toutes les incertitudes, car la généralité des termes employés laisse beaucoup de pouvoir aux tribunaux pour élargir l’application de la règle à des cas qui peuvent être à première vue considérés exclus.
Tel que mentionné, seules les obligations qui résultent des décisions auxquelles les administrateurs ont souscrit sont visées ici. D’où l’importance d’être en mesure de prouver son absence lors de la prise de décision ou d’enregistrer sa dissidence lorsqu’une personne qui agit à titre d’administrateur d’une association n’est pas d’accord avec une décision prise par la collectivité, pour ne pas être responsable des actes découlant d’une telle décision. Il est donc très important de tenir des registres précis où sont inscrits le nom des administrateurs et la date du début et de la fin de leur mandat, et des procès-verbaux des assemblées des membres et des administrateurs. Il est également recommandé de débuter chaque séance par la lecture du procès-verbal de la séance précédente et de soumettre son exactitude à l’approbation de l’assemblée
Dans le cadre de la réforme du Code civil en 1994, les commentaires du ministre de la Justice au sujet de l’article du Code civil traitant de cette responsabilité ce qui suit :
« Cet article impose aux administrateurs de l’association, ainsi qu’à tout membre qui en administre de fait les affaires, une responsabilité semblable à celle des associés en nom collectif pour les obligations nées pendant leur administration : responsabilité solidaire ou conjointe, selon que ces obligations ont été, ou non, contractées dans le cadre de l’exploitation d’une entreprise de l’association, et responsabilité subsidiaire seulement. À la différence, toutefois, de la situation faite aux associés en nom collectif, l’article ne retient la responsabilité des administrateurs ou membres de l’association qu’à l’égard des décisions auxquelles ils ont souscrit pendant leur administration. Par conséquent, l’administrateur ou le membre qui a clairement fait valoir en temps utile sa dissidence à l’égard d’une décision prise par ses pairs ou qui, étant absent lors de la prise d’une décision donnée, n’a pas eu connaissance de cette décision et n’a pu la confirmer serait dégagé de toute responsabilité. Une telle règle reflète mieux la perception générale du rôle et des responsabilités d’un administrateur d’une association contractuelle. »
Finalement, rappelons-nous que l’administrateur agit à titre de mandataire des membres de l’association. Son rôle consiste à représenter l’ensemble des membres, c’est-à-dire la collectivité. En ce sens, la Cour Supérieure du Québec a précisé:
« qu’en tant que représentants de la collectivité des membres, les administrateurs agissent, entre eux et envers les membres de l’association, suivant les règles établies au contrat d’association et en conformité aux mandats reçus (…) les administrateurs agissent, à l’endroit des tiers, à titre de mandataires de la collectivité. Par conséquent, leurs décisions n’affectent, en principe, que les biens de la collectivité, et non les biens des membres individuellement. L’article 2270 n’accorde aucun pouvoir de représentation aux administrateurs à l’égard des droits des membres en particulier. »
À la lumière de ce qui précède, toute personne membre d’une association ou qui a l’intention de joindre une association, devrait, entre autres, analyser le contrat d’association et bien documenter le processus décisionnel à l’intérieure de cette association.
Vous avez des questions ou des idées pour ma prochaine chronique? Contactez-moi au 514-856-5601 (320) ou à malek@maleklaflamme.ca.